La rééducation orthoptique vise avant tout à améliorer les possibilités de fusion. Comme pour fusionner deux images, il faut voir deux images, on doit parvenir à lever la neutralisation. Et ce n’est pas anodin, car si le patient n’a aucune possibilité de fusion (comme c’est le cas pour un strabisme congénital) mais s’entraîne à déneutraliser (voir encadré), il va voir deux images sans aucune chance de les fusionner. Il verra donc double. Et il continuera de voir double même si on aligne les yeux en opérant le strabisme.

Ainsi, si on est certain qu’il n’y a aucune possibilité de vision binoculaire, la rééducation n’a rien à rééduquer.

Dans tous les cas, il est essentiel de suivre les conseils et prescriptions de l’ophtalmologiste/orthoptiste.


La rééducation comporte toujours des séances au cabinet d’orthoptie. Elle peut aussi comporter des exercices à faire à la maison (travail sur stéréogrammes ou sur livret de fusion de Weiss par exemple).


ORTHOPTIE et ORTHOPTISTES

L’orthoptiste est souvent présenté comme le kiné des yeux, faisant travailler les muscles oculomoteurs.


C’est une comparaison pratique, expéditive, et fausse.


La rééducation orthoptique joue sur la plasticité cérébrale et améliore les aptitudes visuelles cérébrales, plutôt que la puissance des muscles oculomoteurs. Ceux-ci ont presque  toujours une force  bien supérieure à celle nécessaire pour maintenir les yeux dans telle ou telle position statique, puisqu’ils sont capables de mobiliser les yeux à grande vitesse lors des saccades.


Le rôle de l’orthoptiste est de plus en plus large car sa formation médicale et son expérience en font le partenaire privilégié de l’ophtalmologiste

Le bilan orthoptique renseigne sur des points essentiels,

1) avant tout qualitatifs :

L’existence d’une vision binoculaire (ou d’une possibilité certaine de vision binoculaire), d’une vision stéréoscopique, d’un strabisme, d’une phorie, de capacités à fusionner insuffisantes (comme l’insuffisance de convergence), d’une neutralisation permanente ou intermittente.


2) ensuite quantitatifs : qualité de la vision binoculaire, importance d’un strabisme (mais compte-tenu de la variabilité de la plupart des strabismes, il est rarement utile de réaliser des mesures très précises)


Prédire un avenir peut le provoquer !

le simple fait de chercher fréquemment la seconde image conduit à la trouver de plus en plus facilement...et elle finit parfois par s’imposer. Le seul fait de prédire à un patient strabique qu’il va voir double, peut conduire celui-ci à chercher souvent s’il voit double, à trouver de plus en plus facilement la seconde image, jusqu’à ce que celle-ci s’impose à lui, et qu’il voit double.

Ceci est particulièrement vrai pour la chirurgie. Un patient qui redoute particulièrement une diplopie post-opératoire aura certainement plus de difficultés à retrouver un scotome de neutralisation après chirurgie s’il cherche sans cesse s’il voit double.

. La strabologie est le cœur de la formation des orthoptistes qui sont compétents à chaque étape :

- diagnostic : bien au-delà des mesures d’angles de strabisme, le bilan orthoptique répond à des questions essentielles tant pour le bilan initial du strabisme, que pour son suivi, ou lors d’un bilan pré-opératoire permettant de choisir le geste chirurgical le mieux adapté,

- choix thérapeutique : dans le binôme ophtalmologiste-orthoptiste, l’ophtalmologiste peut souvent se reposer sur l’orthoptiste pour participer aux meilleurs choix thérapeutiques,

- rééducation proprement dite lorsqu’elle est indiquée.


Stéréogramme de Weiss

La question de la présence ou non d’une vision du relief n’est pas évidente. Lorsqu’on présente un test à un patient et qu’on lui demande s’il le perçoit en relief, comment saura-t-il, s’il n’a jamais vu en relief, si ce qu’il voit est en relief ?

(C’est un peu comme dans Astérix et les Normands qui ne savent pas si c’est " ça " avoir peur)

S’il voit double, on sait qu’il ne voit pas en relief. S’il neutralise, on ne sait pas car cette neutralisation n’est peut-être pas permanente.

Donc, l’orthoptiste demande : " est-ce que vous voyez ce test en relief ? ", et si le patient dit oui, il va devoir chercher des confirmations, de façon à pouvoir affirmer :

- soit que le patient a une vision du relief certaine

- soit que le patient n’a pas de vision du relief

- soit qu’il n’est pas possible d’être certain.

Ce renseignement est essentiel, et le patient doit accepter une redondance des tests, simples ou élaborés.

Exemple ci-contre :

le test du bouchage de stylo

Test du bouchage de stylo


L’examinateur tient un stylo. Le patient en tient le capuchon, et il va, en partant d’assez haut, mettre le capuchon sur le stylo de l’examinateur.

Si le test est franchement mieux réussi les deux yeux ouverts qu’avec un seul œil (celui que le patient préfère), il existe probablement une vision binoculaire.

L’entraînement améliore la performance. Il faut donc commencer les deux yeux ouverts, puis tester avec un seul œil, de façon à ce que la différence ne puisse pas être liée à un effet d’apprentissage.

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